Economie - soldes monstres sur Pékin
Ecrit par: ytty54
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mercredi 5 décembre 2007
Economie - soldes monstres sur Pékin
Un
bon gros mois avant l'heure française, c'était déjà l'heure des soldes
pour l'industrie française en Chine. 20 milliards d'euros dépensés en
shopping en tout genre, quelle performance ont salué les médias
français ! Peu de mots sur les conditions de ces négociations et sur la
portée de telles conclusions qui concernent pourtant deux de nos
derniers fleurons industriels : le nucléaire et l'aéronautique.
Dans
le Barnum médiatique de notre Président, cap était mis sur la Chine
après déjà tant d'autres destinations. Et comme de coutume, un voyage
égal un effet d'annonce. Pas question donc que de gros contrats
négociés depuis parfois des années ne se concluent avant ou après la
visite, non, les contrats doivent se conclure pendant la visite.
Une
visite non dénuée d'attraits touristiques d'ailleurs et effectuée en
famille puisque maman Sarkozy et un de ses rejetons l'accompagnaient.
Son avocat aussi d'ailleurs ! Je suis à cette occasion plutôt content
de savoir que mes impôts peuvent donc servir à des déplacements
personnels de la famille. C'est un beau concept, les voyages du coeur,
quand vous partez à l'étranger, emportez une personne âgée, on compte
sur vous. Coluche aurait sûrement adoré. Maman Sarko a certainement
adoré également, on l'espère en tout cas vu que la nuit à l’hôtel
Sofitel Wanda de Pékin au sein de la suite de 900 mètres carrés et
quatre jacuzzi, coûte 9300 euros la nuit...
Mais vous me direz qu'est-ce comparé à 20 milliards ? une broutille.
Comme
les droits de l'homme, on ne va tout de même pas pinailler pour
quelques égarements alors que le succés économique nous tend les bras ?
Pour être sûr de pas froisser, le Secrétaire d'état en question,
pourtant du voyage aux Etats-Unis, était restée à Paris...
D'ailleurs,
l'occasion était trop belle de faire la nique à nos voisins allemands
habituellement si dominateurs à l'export. Il faut dire que la
chancelière, après les Etats-Unis, l’Australie, le Canada et le Japon
venait d'accueillir le dalaï-lama, drôle d'idée alors que nous
attendons sous peu le Colonel Kadhafi...
Ni une ni deux mais bien
des contrats d'une valeur d'environ 20 milliards d'euros signés, dont
deux réacteurs nucléaires EPR d'Areva, et une commande d'Airbus. La
France et son pour cent de part de marché chinois a il est vrai une
marge de 99% qui ne peut qu'augurer des jours meilleurs. Mais on ne va
pas bouder notre plaisir.
Ben si tout de même un peu :
Airbus est invité à fournir 110 avions A320 et 50 A330 à la Chine.
Première
condition, la signature d'un accord cadre entérinant la participation
de l'industrie chinoise au programme de l'A350 à hauteur de 5 %.
Deuxième condition, le
coeur de l'opération se situera à... Tianjin où une ligne d’assemblage
du moyen-courrier A320 vient d'être finalisée pour qu'un premier Airbus
made in China soit assemblé au milieu de
l’année 2009. Un rythme de quatre avions par mois est ensuite espéré
dès 2011. C'est une première mondiale puisque ni Airbus, ni
Boeing n'avait jusque là délocalisé l'assemblage de leur pays
d'origine. Plus troublant, dés septembre 2007, Laurence Barron,
président d'Airbus China glissait dans quelques interviews qu'Airbus
souhaitait externaliser davantage sa production.
Ces derniers jours
comme un écho fidéle, c'est le président d'EADS qui évoque une
éventuelle délocalisation de la production en zone dollar. Du coup les
milliards emportés risquent d'avoir un goût amer pour les salariés
européens du groupe comme ses sous-traitants brittaniques ou belges et
le voyage de Nicolas Sarkozy à Pékin devient un aimable
promène-couillon destiné à entériner ce choix stratégique en douceur.
Une suite logique des choses diront certains si l'on veut bien croire que d'ores et déjà 15%
à 20% de l'ensemble des pièces de l'Airbus A320 proviennent de Chine.
Une suite pas si inquiétante si l'on en croit EADS qui précise "Le
groupe assure vouloir éviter un transfert complet de technologies." Je
dois reconnaître que le "complet" n'est pas trés encourageant d'autant
qu'au final, Airbus ne détiendra que 51% du nouveau site de production.
Imagine t'on Georges Busch venir en France signer un contrat de 10 milliards
de Boeing fabriqués à... Villacoublay ? Angela Merckel signant un
accord pour 7 milliards d'Audi assemblées à ... Chateauroux ? et tous
deux revenir en quasi héros dans leurs pays ?
Et bien en France non seulement on l'imagine mais on le fait, on solde, on brade, on dilapide, on ventile, on éparpille façon puzzle nos dernières richesses.
Le cas Areva est d'ailleurs consternant :
deux
réacteurs nucléaires de troisième génération seront construits à
Taïshan, dans le sud du pays, près de Macao. Areva fournira en outre le
combustible nécessaire au bon fonctionnement de ces centrales pendant
15 ans. Il y a un an, la Chine avait corrigé le gouvernement français
et Anne Lauvergeon en confiant la construction de quatre réacteurs à
l'Américain Westinghouse. Motif de ce choix : le refus catégorique du
groupe français, salué alors, de transférer sa technologie.
Aujourd'hui,
l'entreprise française rêve d'une future usine de traitement et de
recyclage des combustibles usés en Chine pour 22 milliards de dollars
(dans deux ou trois ans). Elle s'enorgueillit que le contrat soit
partiellement libellé en euros.
Mais elle passe rapidement sur les modalités pratiques de réalisation de ces réacteurs :
une société d'ingénierie commune à 50-50 France-Chine.
Pas
de problème pour Areva qui précise "Nous transférons la technologie
nécessaire dans le consortium que nous formons avec le client, et ce
consortium, dont nous avons 50%, restera propriétaire de la
technologie." Ben voyons, au pays de la contre-façon...
Les soldes ne s'achèvent donc pas forcément dans l'allégresse comme s'ils se réalisaient sur le dos des français et pour le plus grand profit des grandes entreprises et des économies émergentes. Une situation à méditer qui semble marquer les limites de notre système économique. Quel avenir pour l'emploi en France si même notre industrie de pointe est bradée au nom de l'euro fort, des charges sociales, de la coopération internationale ou du temps qu'il fait ?
Est-ce vraiment du ressort du politique que de jouer les VRP mondiaux et d'utiliser les échanges commerciaux comme argument de promotion et d'auto-satisfaction quand, dans le même temps, des pans entiers de notre activité sont menacés de disparaître ? pour quel coût social ? pour quelle société ?
A ces questions nos politiques ne répondent pas ; ils sont déjà partis pour d'autres destinations, pour zapper sur une autre actualité, séduire d'autres caméras.
Mais un jour, il faudra bien y répondre...A propos de l'auteur
http://yttymaison.blogspot.com
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