«Industrie du Diagnostic In Vitro : l’innovation en danger ! »
Ecrit par: GLC
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Une tribune de M. Christian Parry, Vice–Président du SIDIV et de l'EDMA.
L’innovation incrémentale face à l’innovation de rupture
Cela vaut pour tous les domaines : le public attend de l'innovation des avancées majeures, le bond en avant, la rupture qui laisse sur place ce qui existait auparavant. Le domaine de la biologie médicale et l'industrie du Diagnostic in Vitro (DIV) qui la sert n'échappent pas à ce schéma. Une pression médiatique en découle qui accroît encore le besoin d’être celui par qui advient la rupture tant attendue.
Dès lors, chaque société travaille à des avancées majeures pour le bénéfice des patients, en caressant le rêve de prendre dix ans d'avance sur ses concurrents par une innovation de rupture. En réalité, la majorité d'entre elles consacrent les trois quarts de leur budget de R&D à de l'innovation incrémentale ; c'est-à-dire à une innovation, faite pas à pas, au quotidien, sans publicité particulière, et qui apporte, dans une linéarité peu perceptible, sa contribution au progrès de la Biologie Médicale.
Chez les industriels du DIV, cette innovation intervient le plus souvent sur l'amélioration de la technique et des outils utilisés pour un biomarqueur* donné. De sorte que les progrès porteront sur les réactifs de DIV (qui servent à effectuer l'analyse) ou sur les automates (qui réduisent au maximum l'intervention humaine, lors de l’analyse en laboratoire).
Les avancées concernent donc les performances de l'analyse : spécificité, sensibilité, reproductibilité, stabilité etc. Certes, elles apportent plus de fiabilité, permettent de diagnostiquer un état pathologique plus précocement ou même de rendre un résultat au biologiste et au médecin plus rapidement. Mais ce ne sont que des bonus apportés à l’existant. On parle ainsi de « générations de tests » ; un test de 4e génération signifiant que l'industriel a redéveloppé entièrement son concept de produit pour la quatrième fois consécutive après trois versions commerciales précédentes. L'écart constaté entre un test de 4e génération et un test de première génération peut toutefois apporter autant de bénéfice pour le patient qu'une innovation de rupture.
Ignorer l'effort permanent que consacrent les entreprises du DIV à l'innovation incrémentale comporte un effet pervers qui peut largement lui nuire voire la tuer.
Le problème posé à l’industrie du DIV
L’industrie du DIV, dont les produits couvrent toute la planète, est encore majoritairement constituée de sociétés issues du vieux monde industriel (avec quelques beaux fleurons en France). Pour autant, elle innove constamment. Ce sont, chaque année, plusieurs centaines de nouveaux produits qui sont mis à disposition des biologistes et des médecins. Sans oublier qu'une bonne part des innovations est tournée vers le biologiste, pour lui rendre l'analyse plus facile, plus autonome ou plus rapide à effectuer…
Le problème vient de ce que les caisses d'assurance maladie peuvent décider qu'un biomarqueur*, étant sur le marché depuis longtemps, il est justifié de baisser son niveau de remboursement. Elles ne considéreront pas que le ou les industriels concernés ont investi dans plusieurs générations consécutives de tests et pour un coût qui n’aura cessé d'augmenter. L'industriel, fournisseur de tests, n’est, dans le cas général, pas même consulté quand la décision est prise par l’autorité.
Or, au fil des ans, le temps de développement d'un réactif de DIV est passé de six mois à cinq ans en moyenne, au fur et à mesure de la sophistication des connaissances et des techniques. D’autre part, son évolution s’est faite aussi au regard des réglementations internationales toujours plus contraignantes. Enfin, on observe une montée en puissance des systèmes d'assurance de qualité internes aux entreprises, pour garantir la qualité du produit et le résultat biologique qui lui est associé. Parallèlement, compte tenu de la surenchère technologique et de la vive compétitivité qui animent ce secteur, la durée de vie du produit sur le marché n'est que de quelques années.
Et voici par où le bât blesse…
Comme chacun sait, c'est l'acte effectué par le biologiste qui est remboursé et non directement le produit, lequel ne représente en fait qu'environ 15% du coût de ce dernier. Dans ce cadre, le laboratoire de biologie médicale pourra faire pression sur son fournisseur industriel, pour qu'il baisse ses prix, et absorber une baisse de remboursement. Ce phénomène se trouve encore amplifié par la tendance actuelle à la concentration des laboratoires, lesquels se groupent en centrales d’achat et font d’autant plus pression sur les prix… à la baisse !
De fait, si l'administration ni les utilisateurs ne prennent pas conscience de l'importance de la notion d'innovation incrémentale (qui, pour un même biomarqueur, peut s'étaler sur plusieurs décennies !), on pourrait voir disparaître des sociétés, parfaitement rodées aux règles de qualité internationales, au profit de sociétés de pays émergents, qui sont, à l’heure actuelle, loin de satisfaire à ces règles et difficilement accessibles au contrôle des autorités de santé compétentes.
*biomarqueur : tout paramètre de biologie médicale mesurable par une technique d'analyse spécialisée.
À propos du Syndicat de l’Industrie du Diagnostic In Vitro :
Créé en 1977, le Syndicat de l’Industrie du Diagnostic In Vitro (SIDIV) fédère la majorité des acteurs du diagnostic in vitro. Avec près de 80 sociétés adhérentes, il représente plus de 95% du chiffre d’affaires de la profession soit 1,79 milliard d’euros annuels. Le SIDIV, interlocuteur privilégié et référent des pouvoirs publics, défend les intérêts matériels, moraux et économiques de ses adhérents. Au-delà de sa mission d’étude et de défense des intérêts de la profession, le SIDIV s’engage au quotidien pour la reconnaissance du rôle stratégique du diagnostic in vitro dans toutes les décisions de santé.
Pour en savoir plus : www.sidiv.fr
A propos de l'auteur
M. Christian Parry, Vice–Président du SIDIV et de l'EDMA.
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