PRESSE CONTACTS NEWS N°28 Ordre National des Vétérinaires Spécial antibiothérapie en médecine vétérinaire • Mai 2011
Ecrit par: cburg
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>> Edito
Les vétérinaires de France engagés dans la lutte contre l’antibiorésistance
En un demi-siècle, le regard que les médecins et les vétérinaires, les scientifiques et la société portent sur les antibiotiques et sur la remarquable révolution médicale qui y est attachée a changé. Ces substances furent d’abord, dans une société n’ayant foi que dans le progrès scientifique, des gisements infinis d’espoir qui allaient permettre à l’Homme de vaincre toutes les maladies bactériennes, humaines et animales, et qui furent même utilisés par l’agriculture productiviste de l’après-guerre comme facteurs de croissance dans l’alimentation des animaux. C’était sans compter sur le fait que les gisements n’étaient pas infinis et surtout c’était sans compter sur le phénomène naturel de l’antibiorésistance.
Aujourd’hui, dans une société qui veut croire au développement durable, la disposition d’esprit nouvelle est à l’économie d’emploi de ces armes merveilleuses et à la lutte contre l’antibiorésistance. Celle-ci est résolument engagée.
Dans le domaine de la santé animale, avec la préoccupation première de santé publique dont ils sont les premiers véritables garants vis-à-vis de la société, les vétérinaires du monde entier sont en première ligne pour mener cette lutte destinée à préserver un capital médicamenteux précieux pour les hommes. Les vétérinaires de France ne sont pas en reste, bien au contraire et nous venons ici présenter au public à travers leurs médias quelques premiers éléments de leur engagement.
Michel BAUSSIER, Président du Conseil supérieur de l’Ordre des vétérinaires
>> Antibiothérapie sous haute surveillance afin de préserver la santé publique et animale
Comme en médecine humaine, les antibiotiques ne sont pas automatiques en médecine vétérinaire. Depuis de nombreuses années, la profession multiplie les actions pour une utilisation raisonnée et contrôlée des antibiotiques afin de limiter le phénomène d’antibiorésistance. Un enjeu de santé animale et publique !
Etat des lieux avec le Dr Pierre BROUILLET, conseiller du CSO (Conseil supérieur de l’Ordre des vétérinaires), expert qualité du lait à la Société Nationale des Groupements Techniques Vétérinaires.
> Les antibiotiques : une ressource à maîtriser, indispensable pour la santé et la qualité de l’alimentation !
L’antibiothérapie est une avancée extraordinaire contre les maladies infectieuses. Grâce à l’utilisation des antibiotiques, le nombre de maladies infectieuses a considérablement chuté depuis une soixantaine d’années, côté humain comme animal. Malheureusement, dans les pays en voie de développement, des millions d’hommes décèdent encore car ils n’ont pas accès aux antibiotiques.
L’antibiothérapie est donc une véritable chance pour les pays développés. Elle a permis d’accroître l’espérance de vie mais aussi de garantir la sécurité alimentaire des produits d’origine animale.
En revanche, l’utilisation d’antibiotiques a accru les phénomènes de résistance des bactéries. L’antibiorésistance (capacité de certaines bactéries à résister aux effets des antibiotiques) s’est développée au point de devenir un problème majeur de santé publique générant chaque année, selon les estimations, 25 000 décès et 400 000 maladies chez l’Homme dans l’Union européenne.
Si les vétérinaires ont les mêmes besoins en antibiotiques que les médecins, l’utilisation raisonnée des antibiotiques s’impose plus que jamais pour contenir l’antibiorésistance.
Vu qu’aucune nouvelle classe d’antibiotiques n’a été découverte depuis les 30 dernières années, les vétérinaires ont tout intérêt à préserver l’efficacité de la ressource antibiotique actuelle pour continuer à bien soigner les animaux.
Il en va de la santé animale mais aussi humaine, comme le souligne le concept « One health » de l’Union européenne : « animaux + humains = une seule santé ». Il ne faut pas oublier que l’efficacité des antibiotiques vétérinaires est une des garanties de ceux utilisés en médecine humaine.
> Mobilisation accrue des professions médicales et vétérinaires !
La maîtrise de l’antibiorésistance est devenue une priorité pour la France car c’est un enjeu primordial de santé publique & animale. La recrudescence des maladies nosocomiales et l’augmentation de l’antibiorésistance en médecine humaine ont conduit les instances sanitaires à se mobiliser. La campagne de sensibilisation du Ministère de la Santé sur l’utilisation des antibiotiques a permis une diminution de la consommation d’antibiotiques de 25% en médecine humaine.
Depuis de nombreuses années, la profession vétérinaire surveille le phénomène d’antibiorésistance. Elle multiplie les actions pour limiter la consommation d’antibiotiques et la progression de l’antibiorésistance. Mais, en médecine vétérinaire, la marge de manœuvre est loin d’être aussi importante qu’en médecine humaine. En outre, l’arrivée des génériques a relancé la consommation de certains antibiotiques car les génériques sont moins chers.
Face à ce contexte, l’année 2010 a été marquée par d’importantes décisions prises par les instances vétérinaires professionnelles ou administratives au plan national.
• Le Comité national pour un usage raisonné des antibiotiques en médecine vétérinaire
se met en place,
• La Direction générale de l’alimentation (DGAL) va prochainement proposer un Plan National d’Action de Lutte contre l’Antibiorésistance en Médecine Vétérinaire,
• Des groupes travaillent actuellement sur des « fiches actions » ou recommandations concernant les animaux de rente et les animaux de compagnie,
• De nombreuses réunions de concertation ont été suivies en 2010 par l’Ordre National des Vétérinaires et toutes les structures professionnelles vétérinaires,
• L’Ordre National des Vétérinaires s’engage dans un « tour de France » pour informer et sensibiliser les praticiens.
Au plan international, des mesures ont été également prises. L’OMS (Organisation Mondiale de la Santé) et son comité, le Codex Alimentarius, ont défini une liste d’antibiotiques critiques, c’est-à-dire ceux dont on souhaite conserver l’efficacité pour l’Homme. Une démarche également entreprise par l’OIE (Organisation Mondiale de la Santé Animale) afin de protéger les antibiotiques critiques destinés aux animaux. La liste est très voisine de celle de la médecine humaine. Parmi les plus importants, citons les Céphalosporines de 3e et 4e génération, les Fluoroquinolones et les Macrolides.
Aujourd’hui, les professionnels de la santé vétérinaire disposent d’éléments suffisants pour intensifier le dispositif de plans d’actions et de conseils auprès des éleveurs, des responsables de filière et des praticiens. Mais, ces recommandations ne seront efficaces que dans la mesure où il sera possible de :
• Faire évoluer les pratiques d’élevage en conseillant au quotidien les éleveurs sur l’importance des bonnes pratiques d’hygiène et d’utilisation du médicament vétérinaire,
• Favoriser des plans de vaccination,
• Développer une pratique raisonnée des antibiotiques prescrits par les vétérinaires,
• Informer et former les vétérinaires & les étudiants aux problèmes de l’antibiorésistance.
> Et demain ?
Certes, les traitements alternatifs se développent (phytothérapie, homéopathie…), mais ces médecines, dont l’efficacité n’est pas suffisamment évaluée, n’ont pas vocation à se substituer au recours nécessaire aux antibiotiques.
C’est pourquoi, à l’avenir, il faudra continuer à préserver l’efficacité des antibiotiques, qui dépend avant tout de :
• La compétence du vétérinaire prescripteur,
• Sa formation,
• Son respect des bonnes pratiques,
• Mais aussi de l’information communiquée à l’ensemble des acteurs.
Mais il ne faut pas occulter que l’antibiorésistance est aussi liée à un problème économique. La société déplore les phénomènes d’antibiorésistance chez l’Homme. Etant donné que la santé humaine est intrinsèquement liée à celle des animaux, il faudrait donner de véritables moyens à la profession vétérinaire afin qu’elle développe les analyses de diagnostic liées à l’antibiorésistance. En outre, les schémas économiques de compétitivité imposés aux éleveurs ne leur permettent pas forcément d’investir dans des modèles de production plus respectueux de l’hygiène, donc moins consommateurs d’antibiotiques, etc.
>> Chiffres clés : antibiothérapie en médecine vétérinaire
> Consommation d’antibiotiques vétérinaires en France
La France est le 2e pays le plus utilisateur en Union européenne, après l’Allemagne. Ce chiffre est en corrélation avec le nombre de ses animaux de rente.
La consommation d’antibiotiques est beaucoup plus élevée en médecine vétérinaire qu’en médecine humaine mais l’exposition (consommation par rapport à l’unité de poids) est 10 fois moins importante : 4 millions de tonnes d’humains à traiter contre 15 millions de tonnes d’animaux.
> Consommation par espèce
93% du tonnage est destiné aux animaux de rente, sachant que 52% est consommé par l’élevage porcin par voie orale, ce qui n’est pas sans conséquence sur l’environnement : risques de transmettre de l’antibiorésistance chez les hommes via la pollution des eaux et de la terre dans une zone géographique d’élevage.
Les bovins sont les 2e consommateurs avec 17,6%. La voie orale n’est pas pratiquée sauf chez le veau. Les administrations d’antibiotiques sont principalement parentérales (injectables) et intramammaires. Les résistances générées par l’administration orale peuvent être qualifiées d’exceptionnelles. Au cours des 40 ans d’utilisation de pénicillines M pour le traitement des mammites, aucune résistance n’a été déclarée à ce jour pour le Staphylococcus aureus et les infections liées à ce germe ont considérablement régressé.
> Evolution de la consommation de 1999 à 2009
La consommation d’antibiotiques entre 1999 & 2009 a baissé : - 19,8% par rapport à 1999 et - 11,3% entre 2008 et 2009. Mais l’exposition a augmenté : + 12,5%.
L’efficacité des antibiotiques les plus récents permet un dosage moindre pour traiter les animaux et surtout une meilleure diffusion jusqu’au site infectieux. En revanche, l’apparition des génériques relance la consommation car ils sont moins onéreux.
> Marché du médicament vétérinaire
En médecine vétérinaire, la consommation d’antibiotiques représente 16,5% des ventes de médicaments (131 millions d’euros pour les antibiotiques) contre 3,1% en médecine humaine (620 millions d’euros).
La part de marché des vaccins a beaucoup augmenté ces dernières années. Elle dépasse maintenant celle des anti-infectieux. Il apparaît donc nécessaire de continuer à développer la prévention par la vaccination afin de limiter les pathologies dans les élevages.
⇒ Anti-infectieux : 18,95%
⇒ Vaccins : 21,70%
⇒ Antiparasitaires : 27,35%
⇒ Autres : 32,00%
Source : AIEMV 2011 (Association interprofessionnelle d’étude du médicament vétérinaire)
> Evolution des niveaux d’exposition aux antibiotiques injectables et oraux 1999/2009
L’exposition a augmenté de 12,5% toutes espèces confondues :
⇒ Chiens & chats : + 81%
⇒ Volailles : + 74%
⇒ Porcs : + 2,5%
⇒ Bovins : - 3%
La mise sur le marché de produits longue action, en particulier chez les animaux de compagnie, peut expliquer cette augmentation d’exposition mais avec des gains d’efficacité et d’observance des traitements significatifs.
Avec une exposition en hausse de 81%, l’usage des antibiotiques chez les chiens et les chats est à surveiller. Au contact des hommes, ils peuvent véhiculer des bactéries résistantes au travers de maladies communes aux hommes et aux animaux appelées zoonoses.
En revanche, les nombreuses campagnes de sensibilisation auprès des éleveurs de bovins ont particulièrement porté leurs fruits avec une baisse de 3% du niveau d’exposition.
Source : ANSES 2011 (Agence nationale de sécurité sanitaire de l’alimentation, de l’environnement et du travail)
>> Antibiorésistance : genèse et modes de transmission
Utilisés pour traiter les maladies infectieuses chez l’Homme et l’animal, les antibiotiques ont la propriété de détruire ou de bloquer la multiplication des bactéries. Toutefois, certaines d’entre elles réussissent à échapper à l’action de certains antibiotiques et développent de la résistance. Un phénomène qui peut être freiné par la bonne utilisation des antibiotiques mais aussi par l’application de simples règles d’hygiène. Explications avec le Dr Pierre BROUILLET :
> Qu’est-ce que l’antibiorésistance ?
C’est la capacité d’une bactérie à résister aux effets des antibiotiques.
Cette résistance peut s’opérer de deux façons :
• La résistance dite “naturelle”: certaines espèces de bactéries possèdent naturellement la capacité de résister aux antibiotiques :
- Soit les bactéries ne possèdent pas dans leur structure la cible de l’antibiotique,
- Soit l’antibiotique ne peut pas pénétrer la paroi de la bactérie car la cible à atteindre est interne.
D’autres bactéries possèdent naturellement une enzyme capable de détruire l’antibiotique : 40 à 50 % des Staphyloccocus aureus possèdent une pénicillinase capable de rendre la pénicilline inactive.
• La résistance dite “acquise” : au contact des antibiotiques, certaines bactéries peuvent développer une mutation génétique aléatoire leur permettant de résister et de continuer à se multiplier. Lorsqu’une bactérie est porteuse ou acquiert plusieurs gènes de résistance, on dit qu’elle est polyrésistante.
> Quelles sont les causes de l’antibiorésistance ?
On sait qu’un grand nombre de ces gènes de résistance existaient avant la découverte des antibiotiques. Cependant, l’antibiothérapie a considérablement accéléré l’émergence de ce phénomène.
En effet, en éliminant les bactéries les plus sensibles, l’usage des antibiotiques conduit inévitablement à sélectionner des bactéries résistantes.
Il existe deux types de transmission :
• Transmission verticale : les bactéries transmettent leurs gènes de résistance à leur descendance.
• Transmission horizontale : les bactéries transmettent leur résistance à d’autres espèces de bactéries très variées, pathogènes ou non, qui deviennent à leur tour résistantes.
> Quels sont les modes de transmission ?
Les bactéries disposent de multiples systèmes et vecteurs pour échanger leurs gènes entraînant l’émergence, et surtout la dissémination, de mutants et de mécanismes génétiques de résistance.
L’administration par voie orale est incontestablement la plus dangereuse. On sait que les micro-organismes porteurs de mécanismes de résistance peuvent se développer très rapidement au sein des flores commensales de l’Homme et de l’animal (flores bactériennes présentes en particulier dans le tube digestif et sur la peau). En mettant directement en contact les antibiotiques avec la flore bactérienne de l’intestin, on augmente ainsi considérablement les chances de développement et de transmission d’antibiorésistance.
De plus, la voie orale peut aussi mettre en contact les antibiotiques avec les bactéries de l’environnement, du sol par exemple, et ainsi disséminer facilement l’antibiorésistance. Notons que d’autres voies d’administration peuvent également être favorables à l’antibiorésistance, comme par exemple les antibiotiques injectés par voie parentérale pouvant se diffuser en partie dans l’intestin.
L’hygiène, facteur de lutte contre l’antibiorésistance !
Le transfert de l’animal à l’Homme peut se réaliser de 3 façons :
• En direct, par contact avec l’animal, en particulier pour les bactéries responsables de zoonoses,
• De manière indirecte, par l’intermédiaire de l’environnement de l’animal. Par exemple : eau ou terre contaminées par des bactéries résistantes pathogènes ou non.
• Ou par le biais d’aliments contaminés par ces mêmes bactéries.
Alliée à une bonne utilisation des antibiotiques, l’hygiène apparaît comme l’un des moyens les plus efficaces pour limiter le développement de l’antibiorésistance que ce soit au niveau de l’élevage, de l’alimentation ou de l’univers hospitalier. En élevage, les bonnes pratiques d’hygiène concourent notamment à maîtriser le développement de pathologies et donc à limiter l’utilisation des antibiotiques.
>> Encadrement réglementaire de la prescription et de la délivrance des antibiotiques
Les antibiotiques sont classés dans les substances vénéneuses qui ne peuvent être achetées que sur ordonnance vétérinaire dans un cadre bien précisé par la réglementation. La délivrance hors circuit réglementaire est une infraction au Code de la santé publique pouvant être sévèrement réprimée.
> Classification
Les médicaments contenant des molécules antibiotiques sont réglementairement classés dans la liste 1 des substances vénéneuses.
« Des obligations particulières seront édictées par voie réglementaire pour l'importation, la fabrication, l'acquisition, la détention, la vente ou la cession à titre gratuit des substances ne constituant pas des médicaments vétérinaires, mais susceptibles d'entrer dans leur fabrication. » (Article L. 5144-1 du Code de la santé publique).
> Prescription et délivrance
La prescription et la délivrance des antibiotiques sont très encadrées par la réglementation prévue par le Code de la santé publique, le Code rural et le Code de déontologie vétérinaire.
Les délivrances doivent faire l’objet d’une prescription vétérinaire qui ne peut concerner que des médicaments ayant eu une AMM (Autorisation de Mise sur le Marché) pour la pathologie & l’espèce concernées et contenant des molécules dont la LMR (Limite Maximale de Résidus) est définie pour le lait, la viande, les œufs et le poisson.
Le vétérinaire doit respecter une liste de substances interdites à la prescription, comme le chloramphénicol par exemple. Il ne peut délivrer des médicaments antimicrobiens qu’aux animaux qu’il soigne régulièrement après avoir :
• procédé à un examen clinique,
• ou établi un bilan sanitaire de l’élevage et des protocoles de soins,
• ou fait réaliser des examens nécropsiques (post mortem).
Par ailleurs, l’antibiothérapie préventive n’est plus admise. La prescription doit être faite dans un but curatif et l’antibiothérapie facteur de croissance est interdite depuis fort longtemps.
> Ordonnance
L'ordonnance, conservée pendant 10 ans par le vétérinaire prescripteur, comporte obligatoirement :
• Les nom et adresse du prescripteur,
• La date de prescription,
• Les nom et prénoms du détenteur du ou des animaux ainsi que son adresse,
• Les moyens d'identification des animaux (espèce, âge, sexe, signalement et numéro matricule),
• Le nom ou la formule du médicament (pour les aliments médicamenteux, le détail des composants du support alimentaire n'est pas exigé),
• La voie d'administration, le point d'inoculation ou d'implantation, le temps d'attente et le numéro de lot,
• La mention « Renouvellement interdit ».
L’ordonnance doit être remise à l’éleveur avant la délivrance des médicaments. Elle doit être conservée par ce dernier pendant 5 ans et devra suivre l’animal en cas de changement de propriétaire.
Les administrations de médicaments aux animaux doivent être inscrites dans le registre des traitements de l’élevage qui est paraphé par l’éleveur et le vétérinaire.
> Ayants droit
Le médicament vétérinaire ne peut être vendu que par :
• Les vétérinaires dans le cadre pharmaceutique restreint à leurs propres clients. Ils ne peuvent pas honorer l’ordonnance d’autres praticiens,
• Le pharmacien dans le cadre de l’exercice en officine ouverte, sur ordonnance de tout vétérinaire,
• Les groupements de producteurs agréés : uniquement pour les médicaments préventifs figurant sur une liste autorisée pour les Programmes Sanitaires d’Elevage (PSE). Les agréments sont délivrés par les préfets de région sur avis des commissions régionales de la pharmacie vétérinaire.
> Déclaration de pharmacovigilance
En cas d’échec thérapeutique ou d’accident faisant suite à l’administration de médicament, le vétérinaire a obligation de faire une déclaration de pharmacovigilance.
> Importation
Toute importation de médicament contenant des substances vénéneuses doit faire l’objet d’une autorisation par l’Agence Nationale du Médicament Vétérinaire.
> Publicité
Comme le prévoit le Code de la santé publique, « la publicité en faveur des médicaments vétérinaires n'est autorisée auprès des personnes physiques ou morales habilitées à distribuer les médicaments vétérinaires par les articles L. 5143-2 et L. 5143-6, que pour les médicaments vétérinaires qu'elles sont autorisées à prescrire ou à délivrer. »
Source : Dr Pierre BROUILLET
>> De multiples garanties pour la qualité de l’alimentation
En France, la probabilité de retrouver dans son assiette des résidus médicamenteux est quasi inexistante. Le consommateur bénéficie de 3 grands niveaux de protection, explique le Dr Christophe HUGNET, membre du Conseil Régional de l’Ordre des Vétérinaires de Rhône-Alpes.
> Respect de l’Autorisation de Mise sur le Marché des médicaments vétérinaires
Comme pour les médicaments humains, les médicaments vétérinaires doivent recevoir une autorisation par l’Agence Nationale du Médicament Vétérinaire (ou par l’Agence Européenne du Médicament) pour être commercialisés en France.
Un long processus d’évaluation scientifique mené par des experts indépendants internes et externes conduit à une analyse critique de :
• la sécurité d’utilisation du médicament tant pour l’animal destinataire du traitement que pour le manipulateur du produit,
• l’innocuité des denrées animales consommées (lait, œufs, viandes et abats),
• et bien sûr de l’efficacité du traitement.
Concernant les antibiotiques, des critères supplémentaires sont également pris en compte : la prévention des risques d’antibiorésistance et l’absence de toxicité environnementale. Depuis plusieurs décennies, les antibiotiques ne peuvent plus être autorisés pour une utilisation de type facteurs de croissance : seules des indications curatives sont autorisées.
> Observation des délais d’attente avant commercialisation des denrées d’origine animale
Pour tout médicament destiné à des animaux producteurs de denrées alimentaires (œufs, lait, viande et abats), des délais d’attente avant commercialisation de ces denrées sont déterminés. Ces délais protègent ainsi le consommateur. Des facteurs de sécurité sont utilisés, rendant ainsi impossible une exposition accidentelle à des principes actifs via son alimentation. Lors de leurs prescriptions, les vétérinaires indiquent toujours ces délais à l’éleveur : cette mission de santé publique est fondamentale pour la profession.
> Contrôles systématiques dans toutes les filières
Toutes les laiteries réalisent des contrôles systématiques pour la recherche de résidus d’antibiotiques dans le lait lorsque ce dernier arrive à l’usine. Ainsi plus de 2 millions d’analyses sont réalisées chaque année. Si une citerne de collecte de lait est détectée positive en résidus, elle est immédiatement détruite et une procédure d’échantillonnage et de traçabilité permet de remonter à l’élevage responsable. Celui-ci est alors lourdement sanctionné. De plus, dans cette filière tout comme celles des œufs, de la viande et du poisson, deux types de contrôle, aléatoires et orientés, sont menés par les autorités de contrôle :
• du Ministère de l’agriculture, de l’alimentation, de la pêche, de la ruralité et de l’aménagement du territoire,
• et de la répression des fraudes.
Grâce à cet important dispositif de contrôles, le vétérinaire s’inscrit comme le garant de la qualité des denrées alimentaires d’origine animale, un acteur majeur de la santé publique.
>> Fédération Vétérinaire Européenne : pour une approche commune effective et efficace
Le point avec le Dr Christophe BUHOT, Vice-président de la Fédération Vétérinaire Européenne (FVE)
Maintenir l’efficacité des antibiotiques vétérinaires est un des pivots fondamentaux du précepte « One Health ». Dans cette logique, la FVE souhaite collaborer avec tous les intervenants de la filière (vétérinaires, éleveurs, industrie pharmaceutique & agroalimentaire..) afin de développer une approche commune effective et efficace.
La profession vétérinaire a pour mission de protéger la santé animale, la santé humaine ainsi que le bien-être animal. La prévention et le contrôle des maladies animales sont des objectifs prioritaires et, en particulier, la prévention des zoonoses et des maladies transmises à l’Homme par l’alimentation. Les vétérinaires assurent à ce niveau un rôle primordial de santé publique.
Parallèlement aux bonnes pratiques déjà mises en place dans les pays européens, une utilisation adéquate des médicaments vétérinaires est fondamentale dans le traitement et la prévention des maladies animales. L’utilisation des antibiotiques n’est pas sans conséquences, notamment en matière de résistance bactérienne.
La Fédération Vétérinaire Européenne suit de très près l’occurrence de l’antibiorésistance. Elle surveille son augmentation ainsi que les risques de transmissions de résistance bactérienne inter espèces. Avec ses membres, la FVE prend toutes les mesures nécessaires pour endiguer ce phénomène dans le secteur des animaux de rente, mais aussi de l’équine et des animaux de compagnie.
Afin de pouvoir prendre des mesures efficaces dans le domaine vétérinaire, il est impératif de dresser un état des lieux sur l’utilisation des antibiotiques, notamment dans les aliments médicamenteux, par espèce et par région. La FVE salue en ce sens la création du « European Survey on Veterinary Antimicrobial Consumption », Observatoire Européen sur la Consommation d’Antibiotiques Vétérinaires.
En vue d’améliorer la lutte contre l’antibiorésistance, la FVE recommande notamment les actions suivantes :
• La prise de mesures réalistes, basées sur des fondements scientifiques, obligatoires, proportionnés et durables.
• La marginalisation de l’utilisation d’antibiotiques à titre préventif. Elle ne pourra plus, par exemple, permettre de compenser de mauvaises conditions d’élevage.
• La prise en compte par les agriculteurs des conseils des vétérinaires en matière d’amélioration des bonnes pratiques d’élevage.
• La restriction d’utilisation de certains antibiotiques en médecine vétérinaire, de manière à préserver l’arsenal thérapeutique en médecine humaine.
• Une amélioration des formations des étudiants et des vétérinaires sur la prescription des antibiotiques et l’antibiorésistance.
La Commission européenne a clairement fait entendre qu’elle souhaite que tous les Etats membres soutiennent ces recommandations, autant en médecine vétérinaire qu’en médecine humaine.
La FVE agit notamment auprès de la Commission européenne afin de favoriser la mise en place d’une politique européenne commune sur les bonnes pratiques de l’utilisation des antibiotiques en médecine vétérinaire.
>> Préserver l’efficacité des antibiotiques : une préoccupation constante pour la SNGTV
Avec le Dr Jacqueline BASTIEN, Vice-présidente de la Société Nationale des Groupements Techniques Vétérinaires
Face à l’essoufflement de l’arsenal thérapeutique et au risque de développement de l’antibiorésistance, la Société Nationale des Groupements Techniques Vétérinaires (SNGTV) met en place depuis de nombreuses années déjà des actions visant à promouvoir l’utilisation raisonnée du médicament vétérinaire. Une démarche qui s’est intensifiée ces dernières années au travers de la diffusion d’un guide des bonnes pratiques de l’antibiothérapie dédié à l’ensemble des vétérinaires et avec la création d’un Comité de coordination national pour un usage raisonné des antibiotiques en médecine vétérinaire.
> Un plan d’actions de grande envergure
Depuis une quinzaine d’années, la SNGTV a mis en place toute une série d’actions spécifiques pour informer et sensibiliser la profession sur le bon usage du médicament vétérinaire. Parmi ces actions, citons :
• Dès 1995, le lancement de la campagne de communication sur la maîtrise des résidus et inhibiteurs dans le lait, au travers des opérations « Zéro inhibiteur » et « Plein feu sur l’ordonnance ».
• En 1996, l’édition d’un 1er guide de bonnes pratiques dans l’utilisation du médicament vétérinaire.
• En 1999, l’organisation des Journées Nationales des GTV sur le thème : « Antibiotiques et antibiorésistance.
• La mise en place, à partir de 2000, d’un référentiel de traitement des infections mammaires pour un usage raisonné des antibiotiques.
• En 2003, l’édition d’un guide de bonnes pratiques du médicament vétérinaire, accompagné d’une campagne de communication et de formation.
• En 2009, l’élaboration d’un guide de bonnes pratiques de l’antibiothérapie à l’usage des vétérinaire.
• En 2010, l’organisation des Journées Nationales des GTV sur le thème : « Antibiothérapie : santé animale et santé publique ».
> Un guide pour promouvoir un usage raisonné des antibiotiques
Depuis 2009, la SNGTV propose ainsi un guide de bonnes pratiques de l’antibiothérapie à l’usage de l’ensemble des vétérinaires.
Objectif ? Promouvoir la bonne utilisation des antibiotiques vétérinaires pour préserver leur efficacité.
Élaboré en prenant en compte les codes d’usage internationaux, ce guide intègre les réglementations nationales, notamment en matière de prescription et de délivrance, ainsi que les recommandations de la SNGTV. Il se décline sous forme de guides spécifiques par filière.
Pour accompagner ce guide, des actions de communication et de formation en direction des vétérinaires sont en cours : diffusion du guide, mise en place de plans d’actions spécifiques au fur et à mesure de leur élaboration.
> Un Comité de coordination national pour l’usage raisonné des antibiotiques en médecine vétérinaire
Pour aller encore plus loin dans cette démarche, un Comité de coordination national, placé sous l’autorité du Ministère de l’agriculture, de l’alimentation, de la pêche, de la ruralité et de l’aménagement du territoire vient d’être créé. Au sein de ce comité, la SNGTV apporte une très large contribution à l’élaboration d’un plan d’action pour promouvoir l’usage raisonné des antibiotiques et notamment cibler les pratiques potentiellement à risque afin de formuler des recommandations à destination des praticiens pour les limiter.
Ses missions ?
• Elaborer des plans d’actions et des recommandations, avec une priorité sur les antibiotiques dits “critiques” (céphalosporines de 3ème et 4ème génération, fluoroquinolones)
• Analyser leur état d’avancement,
• Veiller à leurs articulations avec les actions menées en santé humaine.
Société Nationale des Groupements Techniques Vétérinaires
LA SNGTV est une association à vocation technique d’information et de formation des vétérinaires exerçant en productions animales. Elle fédère les Groupements Techniques Vétérinaires Départementaux, les Groupements Techniques Vétérinaires Régionaux et les Groupements Techniques Vétérinaires « Juniors ».
Ses missions :
• Assurer la formation continue,
• Concevoir et mettre à disposition des praticiens des outils et méthodologies d’intervention en élevage,
• Concevoir et diffuser des guides de bonnes pratiques,
• Organiser et animer un réseau de proximité et de compétences,
• Construire les partenariats nécessaires au service des filières.
>> Plan National des Résidus Médicamenteux dans les eaux de surface (PNRM)
Tout au long de l’année, l’Ordre National des Vétérinaires a participé à une réflexion menée par l’ANSES (Agence Nationale de Sécurité Sanitaire) sur les résidus de médicaments polluant les eaux de surface. Cette réflexion, débutée fin 2009 par une analyse des risques, a évolué en 2010 selon un second axe : l’étude des solutions pour diminuer les risques supposés.
Les teneurs en résidus dans les eaux superficielles sont très faibles et concernent à 87% des médicaments d’origine humaine et seulement à 10% des médicaments d’origine vétérinaire. Pour ces derniers, il s’agit principalement de résidus d’antibiotiques et d’antiparasitaires.
Comment diminuer les résidus des médicaments dans l’environnement : agir dès la mise sur le marché ? Agir sur la consommation ? Ces questions ont fait l’objet de réponses collégiales, en concertation avec les différents organismes professionnels vétérinaires, mettant en avant les diverses bonnes pratiques déjà mises en œuvre par la profession, tant au niveau des médicaments, y compris les anticancéreux, que de leurs déchets.
Le séminaire organisé par l’ANSES a permis, au cours de la restitution des travaux des ateliers, de constater qu’il faut améliorer la lisibilité des outils en place pour la collecte des déchets des vétérinaires et des éleveurs, si l’on veut en assurer la pérennité.
Source : Dr Ghislaine JANÇON, adjointe à la secrétaire générale, CSO.
>> Les antibiotiques d’hier à aujourd’hui
Une avancée sans précédent pour l’Humanité qui a permis de sauver des milliers de vies ! Les antibiotiques ont véritablement révolutionné la médecine humaine et vétérinaire.
La fameuse découverte de la pénicilline est attribuée au Dr Alexander Fleming en 1928, qui a constaté de façon tout à fait fortuite les propriétés de la moisissure Penicillium, empêchant le développement de Staphylococcus aureus dans ses cultures.
Mais il faut savoir que bien avant cette découverte, les Chinois et les Grecs utilisaient déjà des préparations à base de pâtes moisies pour soigner des plaies infectées. Et, au 19e siècle, plusieurs scientifiques avaient émis l’hypothèse de l’existence de substances antimicrobiennes. En 1870, Louis Pasteur avait déjà observé que certains micro-organismes se développaient mal dans un liquide de moisissures.
La production industrielle de la pénicilline a véritablement commencé en 1942. Ce sont les soldats de la 2e Guerre Mondiale qui ont été les premiers à en bénéficier.
1948 est une date importante pour la médecine vétérinaire car elle dispose enfin de son 1er antibiotique pour soigner les animaux. Il faut attendre 1953 pour voir l’apparition du 1er antibiotique bovin intra-mammaire.
Ensuite, apparaissent très vite d’autres antibiotiques entre 1949 et 1962 : tétracycline, aminosides, macrolides… Puis, en 1970, le triméthoprime et les premières céphalosporines qui seront déclinées en plusieurs générations. Et, enfin, en 1978 les premières fluoroquinolones.
Depuis l’apparition des fluoroquinolones des années 1986-1988, aucune nouvelle famille d’anti-infectieux n’a été proposée en médecine humaine comme vétérinaire. Inutile de dire que si une découverte était réalisée, elle serait réservée très certainement à la médecine humaine.
Contrairement aux idées reçues, les gènes d’antibiorésistance existaient déjà avant la découverte des antibiotiques. Tout l’enjeu aujourd’hui est donc bien de préserver l’arsenal thérapeutique en limitant les risques de développement de l’antibiorésistance.
Source : Dr Pierre BROUILLET
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