Société - Autopsie d'une mort annoncée
Ecrit par: ytty54
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Grosso modo nous avons 6 chances sur 10 de mourir d'un cancer ou d'une
maladie cardio-vasculaire pour 1 chance sur 20 de mourir d'un accident.
Dit
comme cela ce n'est guère encourageant je sais et somme toute troublant
si l'on veut bien considérer que les pouvoirs publics, et la société
avec, se focalise beaucoup sur le plus petit risque, l'accident.
Généraliser ne suffit cependant pas. C'est vrai que si l'on prend la
catégorie des 18-25 ans par exemple, l'accident de la route domine le
suicide. C'est vrai également que comme on vit de plus en plus vieux en
Occident certaines causes de mortalité comme les problèmes
respiratoires deviennent dominants. Enfin certains facteurs liés à
notre mode de vie comme l'obésité agravent les tendances. Il n'empêche
que je ressens un trouble certain à la lecture de ces chiffres et le
sentiment d'une surévalutation de certains problèmes au détriment
d'autres.
Les notions de risque zéro, de prévention, de principe de
précaution hantent pourtant nos textes legislatifs jusqu'à modifier nos
comportements. Mais pendant ce même temps, les maladies fauchent à tour
de bras car même si certaines disparaissent, d'autres apparaissent.
Je
ne suis peut être pas objectif ayant eu par exemple un grand père
mineur silicosé mort bien trop tôt, j'ai pu mesurer l'ampleur du
désastre et en même temps le refoulement de ses populations dans des
mouroirs discrets et peu médiatisés. 40 000 morts ont été directement
recensés mais le chiffre le plus représentatif serait 3 à 4 fois
supérieur si on considère la silicose juste comme facteur déclenchant
et si l'on veut bien reconnaître que dans notre pays les maladies
professionnelles sont largement, et volontairement (?) sous-évaluées.
D'après l'INRS d'ailleurs, avec encore environ 300 nouveaux cas
reconnus par an depuis 5 ans, la silicose reste une des maladies
professionnelles les plus importantes en France. L'amiante a ensuite
succédé au charbon dans une aussi belle indifférence ou distance : plus
de 35 000 personnes sont déjà mortes mais 60 à 100 000 sont condamnées
dans les 25 ans à venir !
Pour des causes connues depuis longtemps,
les premières indications sur la dangerosité de l'amiante remontent au
début du... XX° siècle, le constat est déjà accablant. On peut donc
facilement imaginer qu'avec la même discrétion et le même cynisme,
d'autres causes sont soigneusement préservées. Sinon comment expliquer
cette prédominance du cancer qui touche aujourd'hui tous les âges tous
les profils sans que l'on puisse expliquer pourquoi, à cause de quoi,
comment l'éviter. Les difficultés de la recherche en ces domaines sont
avérés et inquiétants. Le silence des industriels, l'omnipotence de la
mondialisation sont assourdissants. Le récent scandale des jouets
chinois plombés n'est il finalement qu'une modeste illustration de ce
qui se produit à notre insu avant d'être diffusé sans contrôle
particulier ?
La santé finalement est elle véritablement un enjeu
politique, un problème sociétal majeur ? Chirac avait fait de son
deuxième septennat celui de la lutte contre le cancer, Sarkozy se
saisit d'Alzheimer mais il y a un tel consensus bon teint que rien
n'est vraiment défini. Du côté de la population, étant tous les uns les
autres dans nos familles et proches touchés par ces maladies qu'il se
dégage une vraie fatalité, une vraie acceptation tacite car une vraie
impuissance. Il n'a qu'à comptabiliser le nombre de manifestations à
caractère humanitaires obligées de se monter pour mettre en lumière
telle ou telle maladie pour constater l'état de quasi abandon que ces
malades et leurs familles peuvent ressentir popur en être réduits à
cela.
Je ne sais quelle instance devrait intervenir mais il me
semble qu'un juge de paix manque à notre système de santé et qu'il est
dangereux pour nous, et demain nos enfants, d'évoluer dans un monde qui
mesure la mort, son nombre, son type, son coût mais n'est pas en mesure
de la limiter, d'agir en amont, d'interdire avant qu'il ne soit trop
tard.
A l'heure des franchises destinées à limiter le coût de la
sécurité sociale, une logique bien financière, à quand une franchise
morale destinée à limiter les causes de notre insécurité médicale ?
A propos de l'auteur
38 ans, vit près de Metz avec Isabelle, deux enfants Séléna et Loïse, un chat, un poisson rouge. Directeur de la communication. Fan du lille Olympique sporting club,amoureux des belles lettres et des belles valeurs
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